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slobodan despot - Page 8

  • Les antifas sans cagoule...

    Nous reproduisons c-dessous un article fort intéressant de Ferdinand le Pic, consacré aux antifas et cueilli dans le n°101 d'Antipresse, lettre d'information de Slobodan Despot, dont la nouvelle formule sera disponible en début d'année 2018.

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    Les antifas sans cagoule

    Ils frappent partout, mais semblent venir de nulle part. Ils dénoncent un «fascisme» omniprésent et fantasmé. Ils n’ont aucune existence juridique mais bénéficient d’incroyables indulgences judiciaires. Qui sont-ils?

    Les Antifas se plaisent à revêtir le noir, toujours encapuchonnés et masqués comme les Black Blocks, dont ils sont l’avatar. Comme on le sait, la dénomination Schwarzer Block fut imaginée dans les années 1980 par la police de Berlin-Ouest pour désigner les Autonomes de Kreuzberg. Ce quartier jouxtant le «Mur» faisait encore partie du secteur d’occupation US jusqu’en 1990. Autrement dit, les Black Blocks sont nés dans un territoire sous contrôle militaire américain.

    C’est important, car au même moment apparaissait aux États-Unis, plus exactement à Minneapolis (Minnesota) l’Anti-Racist Action Network (ARA). Ce groupe recrutait dans les mêmes éprouvettes punk et squat qu’au sein du laboratoire de Berlin Ouest. Entre scientifiques de l’agitprop, on collabore. Dissous en 2013 pour ressusciter sous le nom de Torch Antifa Network, le but de ce mouvement était, dès l’origine, de combattre le sexisme, l'homophobie, les idées anti-immigrationnistes, le nativisme, l'antisémitisme ou encore l'anti-avortement. Bref, quelques-uns des leviers de démantèlement d’une société traditionnelle bordée d’ignobles frontières, que l’on retrouve aussi bien dans les programmes officiels de la Commission de Bruxelles et de ses ONG-écrans que dans les feuilles de route de la galaxie Soros.

    Les étranges filières de l’argent «humanitaire»

    Mais on a beau se faire appeler du doux nom d’Anti-Racist Action Network, cela ne suffit pas: il faut des sous. En cherchant un peu, on les trouve en Alabama, du côté du SPLC (Southern Poverty Law Center), une ONG qui se targue, sur son propre site web, d’être la matrice de l’ARA. Autrement dit, la genèse des Antifas américains n’a évidemment rien de spontané. C’est à ce richissime SPLC qu’a incombé la tâche de créer cet ARA de laboratoire. Il est vrai qu’avec une dotation de financement de plus de 300 millions de dollars, le SPLC a de quoi voir venir, même si on retranche le salaire net de son président, qui émarge à plus de 300'000 dollars par an. C’est beau le «non-profit» politique au pays de l’oncle Sam!

    Mais si ces gens-là ont les moyens, ils ne jouent pas pour autant la transparence sur l’origine des fonds. Il est vrai qu’on n’aime jamais trop raconter pourquoi ces fonds devraient transiter par les Iles Caïmans ni comment ils ont connu la tirelire d’un certain Bernard Madoff.

    Mais pourquoi le SPLC? Très simple, en dehors de la défense de ses minorités préférées, la spécialité du SPLC est de ficher ses adversaires politiques, systématiquement qualifiés de «fascistes», qu’ils le soient ou non, puis de publier ses listes noires très élaborées et constamment mises à jour. Un travail de pro qui est devenu une référence du genre.

    Et les barbouzes qui s’en mêlent

    Ce modèle d’activisme et de fichage très professionnel ne vient évidemment pas de nulle part. Il est notamment issu du modèle imaginé par le mouvement Friends of Democracy qui était en réalité une antenne américaine des services secrets britanniques durant la Seconde Guerre mondiale. Son but officiel était de pousser les Américains à entrer en guerre, tout en fichant les récalcitrants, ce qu’il a continué à faire jusqu’à la fin du conflit.

    Son organe de communication avait pour titre Propaganda Battlefront dont on peut encore trouver des copies en ligne.

    On notera, juste en passant, que ce nom a été ranimé en 2012 par Jonathan Soros, fils de George Soros. Ce choix n’est évidemment pas un hasard.

    Pour revenir à nos Britanniques, ces derniers furent également très actifs à domicile, puisque, toujours dans les années 1980, ils fondaient à Londres L'Anti-Fascist Action (AFA), recrutant là encore dans les mêmes milieux punk et squat. Le label «action antifasciste» avait quant à lui été inventé par les communistes européens des années trente. Une contrefaçon de marque politique non déposée qui présentait l’avantage de donner l’illusion d’une filiation légitime. (Il paraît que question détournement d’image, on sait très bien faire dans les services.)

    A la veille de la chute du Mur, on voit donc bourgeonner aux États-Unis et partout en Europe les mêmes affiliations à un antifascisme «Canada Dry», qui a le goût et l’odeur de l’antifascisme communiste historique, mais pas une goutte de communisme dans sa composition chimique. Une façon de monopoliser l’usage de l’infamante étiquette «fasciste» contre tout adversaire d’un postcommunisme 100 % américanisé, tel qu’il apparaîtra dès 1989, avec la chute du Mur.

    Une galaxie hors la loi

    Il existe donc une raison objective à la simultanéité de l’apparition des Antifas ces années-là. Mais comme c’est encore le cas aujourd’hui, on se garda bien de créer la moindre structure juridique qui permettrait de remonter jusqu’aux organisateurs et financeurs avérés. Il vaut toujours mieux, surtout lorsqu’on travaille avec le grand banditisme. Un nom fut en effet exposé au grand jour pour ses liens avec la mafia de Manchester. Il s’agissait de Desmond «Dessie» Noonan, grand Antifa devant l’éternel mais surtout braqueur professionnel et chef de gang, soupçonné d’une centaine de meurtres (1). Outre ses responsabilités directes dans l’AFA, il fut également l’un des exécuteurs attitrés des basses œuvres de l’IRA. Il mourut finalement poignardé devant chez lui à Chorlton (sud de Manchester), en 2005.

    Son frère Dominic Noonan prit le relais. Outre ses activités mafieuses, on le filma en train de diriger les graves émeutes de Manchester de 2011, dont le déclencheur fut la mort de son neveu, Mark Duggan. Ce dernier, soupçonné d’être impliqué dans un trafic de cocaïne, s’était fait abattre par la police le 4 août 2011, ayant résisté à son arrestation dans le quartier de Tottenham. Il s’ensuivit une semaine d’insurrection qui s’étendit jusqu’à Liverpool, Birmingham, Leicester ou encore le Grand Londres, faisant 5 morts et près de 200 blessés parmi les seuls policiers.

    La porosité des services de renseignement, de la mafia et des activistes d’extrême gauche n’est pas sans nous rappeler le rôle des Brigades rouges dans le réseau Gladio, piloté par l’OTAN. Il se trouve que justement les Autonomes Ouest-berlinois de la guerre froide finissante étaient eux-mêmes affiliés au mouvement italien Autonomia Operaia (« Autonomie ouvrière»), très proche des Brigades rouges. Le monde est si petit!

    Tout ce que la police n’ose pas faire

    Mais le point commun le plus spécifique à tous ces Antifas du monde demeure le fichage. Derrière leurs épais écrans de fumée lacrymogène, leurs capuches noires et leurs casses de vitrines qui font toujours les gros titres, il leur incombe essentiellement de ficher en masse leurs adversaires politiques et d’en exposer publiquement les identités et les occupations, exclusivement sur la base de leurs opinions politiques ou religieuses. Une tâche qui est précisément interdite aux autorités, en démocratie.

    Ces mouvements sont donc objectivement, à cet égard, des supplétifs des services de police et de renseignement. Ce qui explique notamment leur proximité, voire la facilité de leur noyautage, leur impunité ou encore l’extrême difficulté qu’on peut avoir à les identifier.

    Le cas Joachim Landwehr

    C’est par exemple le cas de Joachim Landwehr (28 ans), citoyen helvétique, condamné à 7 ans de prison le 11 octobre dernier par le tribunal correctionnel de Paris, pour avoir, le 18 mai 2016, bouté le feu à l’habitacle d’une voiture de police grâce à un engin pyrotechnique, avec ses deux occupants encore coincés à bord. Une peine plutôt légère pour une atteinte à la vie de policiers.

    On sait que Landwehr est lié au groupe suisse «Action Autonome», dont les mots d’ordre passent notamment par le site <rage.noblogs.org/>, dont 90 % du contenu relève du fichage, avec un degré de précision qui dépasse très largement les capacités d’une équipe d’amateurs, même à temps plein. On se demande d’ailleurs ce qu’attend le Préposé cantonal à la protection de données pour se saisir du dossier.

    On sait également qu’il était présent lors de la manif antifa de Lausanne de mai 2011, et que c’est sans doute lui aussi qui a mis en ligne une petite vidéo de propagande à la gloire de sa promenade.

    On sait enfin qu’il fut acquitté en août 2017 par le tribunal de police de Genève, alors qu’il y avait participé à une manifestation interdite.

    Des agitateurs venus de la «haute»

    En revanche, on connaît mieux les profils de ces complices parisiens. Par exemple, Antonin Bernanos, condamné à 5 ans de prison dont 2 avec sursis, est l’arrière petit-fils du grand écrivain Georges Bernanos. On reste issu d’un milieu plutôt cultivé et protégé chez les Antifas. On imagine que l’œuvre de l’illustre aïeul avait encore sa place dans les discussions familiales. Yves, le père du délinquant et réalisateur sans succès de courts-métrages, le confirmait lors d’une interview pour KTO, l’organe cathodique de l’archevêché de Paris, lequel diffusa d’ailleurs l’un de ces courts-métrages, par charité chrétienne sans doute. Mais on n’a pas trop de mal à comprendre que c’est sa femme, Geneviève, qui fait bouillir la marmite. Elle a la sécurité de l’emploi comme fonctionnaire. Elle est en effet directrice de l’aménagement et du développement à la mairie de Nanterre. Côté convictions, elle est fière de n’avoir pas raté une seule fête de l’Huma depuis ses 15 ans.

    Dès l’arrestation de leurs deux fils (Angel, le plus jeune, sera mis hors de cause), Monsieur et Madame Bernanos ont arpenté les radios, les salles de rédaction, les collectifs et manifs en tous genres, pour dénoncer l’ignominie policière montée de toutes pièces par l’État fasciste contre leur digne rejeton. Ils ont reçu le meilleur accueil, notamment chez Médiapart. Ils ont même réussi à enrôler le vieux Me Henri Leclerc, qui osa comparer l’arrestation du jeune Bernanos aux fameux morts du métro Charonne, durant la guerre d’Algérie. Il arrive que les fins de carrières soient pathétiques…

    Ce qui frappe, c’est la facilité avec laquelle les relais d’opinions se sont mobilisés en faveur d’un délinquant, dont on omet par ailleurs complètement de dénoncer le racisme, sachant que l’un des policiers qu’il attaqua était noir. Dans les réseaux deep-state, on assure donc autant le service après-vente que l’anesthésie morale.

    Même milieu BCBG pour Ari Runtenholz, condamné aussi à 5 ans de prison assorti de sursis, pour avoir défoncé l’arrière de la voiture de police à l’aide d’un plot métallique. Lui, on le trouve classé 34ème de l’épreuve d’épée aux championnats de la fédération française d’escrime de 2013. Il pratique aussi la voile à Granville (Normandie) et participe à des régates officielles. Sports très popu, comme chacun sait.

    Nicolas Fensch, informaticien sans emploi, détonne quant à lui par son âge (40 ans). Il prétend être arrivé là par hasard, alors que les vidéos le montrent s’acharnant à frapper le policier noir avec une tige, très semblable à un nerf de bœuf. La parfaite maîtrise du geste trahit néanmoins un entraînement certain. Qui est-il vraiment? Les policiers qui ont gaffé à l’audience sur le noyautage de la bande n’en diront pas plus. Il écopera aussi de 5 ans dont 2 avec sursis.

    Il y a enfin le LGBT de service: David Brault, 28 ans, devenu mademoiselle Kara, sans adresse en France. Ce(tte) citoyen(ne) américain(e) a traversé tout spécialement l’Atlantique pour la petite fête improvisée. On se demande tout de même si ce n’est pas le SLPC qui lui aurait payé son billet et ses faux frais? Verdict: 4 ans de prison dont 2 avec sursis pour avoir lancé un plot métallique à travers le pare-brise dans le but d’atteindre les passagers. Pas très doux, le trans. Pendant les audiences, à l’extérieur du Palais de justice, plusieurs centaines d’Antifas viendront, comme il se doit, provoquer violemment la police, en soutien à leurs camarades de promotion. Il faut savoir garder la forme et les écrans de fumée.

    Les confluences profondes

    Mais casser de la vitrine ou du flic n’est pas tout. L’idéologie est là. A y regarder de près, elle n’a certes pas grand-chose à voir avec le marxisme, le trotskysme ou l’anarchisme, ni même avec les Gardes rouges de Mao.

    Elle égrène en revanche tous les mots d’ordre qu’on lit ouvertement sur tous les sites des ONG-Ecrans du deep-state euro-atlantique et sorosien: défense des LGBT, de la théorie du genre, des migrants, du multiculturalisme, de l’ineptie des frontières, du voile islamique, et même du Kurdistan libre. Et l’inévitable complément: attaques contre Trump, Vladimir Poutine, le «régime» syrien alaouite, etc.

    Dans les quincailleries en ligne des antifas, on trouve évidemment toute la panoplie du parfait émeutier connecté et tous les conseils pratiques qui vont avec. Un mode de propagation qui a très largement fait ses preuves depuis les révolutions de couleur. Une routine du «sans limite», car il faut quand même bien les motiver ces jeunes!

    Et justement, c’est l’abolition des limites qui est la première condition à la jouissance de la grande casserie. Mais là n’est pas le plus important. Ce qui compte, c’est que, sous couvert de combattre un fascisme fantasmé pour les besoins de la cause, on fiche à tour de bras et on rend tout cela public. Et cela ne scandalise évidemment personne. L’agit-prop manipulée et noyautée par les «services» est donc un leurre. Pendant qu’on s’interroge sur les excuses sociales de leur violence urbaine, ou la qualification juridique de leurs crimes téléguidés, les soutiers de l’antifascisme constituent, là, sous nos yeux, une branche administrative de la police politique du deep-state, qui n’a rien à envier aux recrues de la Stasi.

    Fernand Le Pic (Antipresse n°101, 5 novembre 2017)

    Note :

    1. Cf. Sean Birchall, Beating The Fascists, Freedom Press, Londres, 2010.
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  • Éloge de Cassandre...

    Nous reproduisons ci-dessous un billet d'Eric Werner, cueilli dans le n°96 d'Antipresse, lettre d'information gratuite de Slobodan Despot, disponible par abonnement et financée par les dons de ses lecteurs.

    Penseur subtil et profond, Eric Werner est l'auteur de plusieurs essais marquants comme L'avant-guerre civile (L'Age d'Homme, 1998 puis Xénia, 2015) L'après-démocratie (L'Age d'Homme, 2001), Douze voyants (Xénia, 2010), De l'extermination (Xénia, 2013) ou Le temps d'Antigone (Xénia, 2015) et de recueils de courtes chroniques comme Ne vous approchez pas des fenêtres (Xénia, 2008) et Le début de la fin et autres causeries crépusculaires (Xénia, 2012). Il vient de publier dernièrement Un air de guerre (Xénia, 2017).

    On peut également suivre les chroniques de l'auteur sur L'avant-blog - Chronique de la modernité tardive.

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    Éloge de Cassandre

    Ou trois bonnes raisons de parler dans le vide, envers et contre tout!

    On s’interroge souvent sur l’utilité des conseils. Alfred de Vigny disait: «L’expérience seule et le raisonnement qui sort de nos propres réflexions peuvent nous instruire» [1]. Les conseils aussi bien écrits que parlés ne servent donc à rien. Seule l’expérience nous instruit, articulée à la réflexion personnelle.

    C’est le problème de Cassandre, mais pas seulement de Cassandre: de tous ceux, plus généralement encore, s’employant à dire la réalité. Ils la disent donc, mais personne ne les entend, ni seulement même, bien souvent, les écoute. Ils parlent donc dans le vide. Parfois aussi ils sont victimes de pogroms, de dénonciations publiques (dans les médias officiels, les réseaux sociaux, etc.).

    A quoi bon, dès lors, parler, écrire, enseigner? Autant se taire, rester à l’écart. Les gens ne veulent pas nous entendre? Très bien, qu’ils fassent eux-mêmes leurs expériences. Elles risquent d’être douloureuses, mais après tout c’est leur choix. En temps voulu, on pensera à leur tendre un kleenex: les larmes, cela se sèche. Plus du Merfen en grande quantité pour désinfecter les plaies. La meilleure école de vie, c’est encore la réalité.

    Car l’homme est ainsi fait qu’il vit au jour le jour. C’est ce que relevait déjà Platon. Mangeons et buvons, car demain nous mourrons. Les nuages ont beau s’accumuler à l’horizon, les gens préfèrent regarder ailleurs, penser à autre chose. Ils parlent de la parité hommes-femmes, du prochain remaniement ministériel, etc. Les avertissements ne leur font pourtant pas défaut: attention, vous courez à l’abîme. Des livres se publient: sur le changement climatique, l’immigration, l’islam, la mondialisation, etc. Oui, c’est intéressant. On en discute un moment. Il faut vraiment que l’orage éclate pour que les gens commencent à s’inquiéter. Et même. Ce n’est pas un orage, juste une légère brise. Attendons que cela se calme. Etc.

    Alors que faire?

    A mon avis, continuer quand même. Et cela pour au moins trois raisons. D’abord parce qu’on se le doit à soi-même. «Fais ce que dois, advienne que pourra». C’est la formule kantienne, elle est directement ici applicable. Ensuite, parce que parler, écrire, publier, c’est toujours, malgré tout, semer des graines. La plupart du temps, les graines se perdent, elles ne prennent pas racine. Mais parfois aussi, quand même, elles prennent racine. C’est rare mais cela arrive. Les enseignants le savent bien. On ne sait jamais ce que devient une parole une fois qu’elle a été articulée. Elle peut très bien se perdre. Mais parfois aussi faire son chemin. En ce sens, on ne parle jamais pour rien. C’est une erreur que de le penser.

    Enfin il y a une troisième raison, la plus importante peut-être. Elle est en rapport avec la vertu d’espérance. Il faut l’entendre au sens large. Peu de place, aujourd’hui, est laissée à la vertu d’espérance. On sait plus ou moins vers quoi l’on va. C’est un avenir assez sinistre. On voit mal, en plus, ce qu’on pourrait faire pour se mettre en travers. C’est un rouleau compresseur. Et donc on se dit: «Pesé, compté, divisé». Beaucoup de gens sont sur cette ligne. Eux ne fuient pas la réalité. Ils la regardent au contraire bien en face. Ils ne disent pas non plus: «Mangeons et buvons, car demain nous mourrons». En règle générale, ils mènent des vies dignes. Mais ils se disent aussi: à quoi bon? Pour quoi faire? Comme il n’y a plus rien à faire (parce que cela ne sert à rien), le mieux encore est de ne rien faire. De laisser les choses se faire. C’est ce qu’ils se disent.

    Sauf qu’en adoptant une telle attitude on contribue à renforcer un peu plus encore le rouleau compresseur. On ne dira pas ici qu’il n’y a pas de rouleau compresseur. Le rouleau compresseur existe. En sous-estimer la force serait une erreur. Mais le défaitisme à son endroit n’est pas non plus la bonne attitude. On voit bien l’intérêt qu’ont les dirigeants à laisser croire le contraire. Toute leur communication, on le sait, tourne autour de ça. A les en croire, l’histoire est écrite d’avance. Elle est écrite d’avance, et donc, les choses se feront. Elles se feront de toute manière, que cela vous plaise ou non. Vous aurez beau faire, vous ne les empêcherez pas. Tel est le message. Or, bien évidemment, l’histoire n’est jamais écrite d’avance: ce sont les hommes qui font l’histoire (même s’ils ne savent pas toujours l’histoire qu’ils font).

    Et surtout, il y a l’espérance. C’est quelque chose de très ancré en l’homme. L’homme est ainsi fait qu’il ne peut jamais complètement se dire: il n’y a pas d’issue, tout est verrouillé. Des situations sans issue, il en existe parfois. Effectivement, tout est verrouillé. C’est ce qu’on constate. Pour autant, il est contraire à l’être profond de l’homme de dire (et de se dire): il n’y a rien plus rien à faire. Il peut certes le dire (beaucoup le disent), mais s’il le dit, ce sera toujours en forçant quelque peu sa nature, en se faisant violence à lui-même. Même si, objectivement parlant, la situation est sans issue, réellement sans issue, l’homme, pour autant qu’il s’écoute lui-même, ne se lassera jamais de chercher quand même une issue. Donc, comme Cassandre, de parler, d’écrire et de publier. Il y a une dynamique, en l’homme, qui fait qu’il ne se résignera jamais à rien. A une vie d’esclave moins encore qu’à aucune autre.

    Eric Werner ((Antipresse n°96, 1er octobre 2017)

    Note

    1. Dans Servitude et grandeur militaires.

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  • L'autre Grand Remplacement...

    Le nouveau numéro de la revue Éléments (n°168, octobre - novembre 2017) est disponible en kiosque.

    A côté du dossier consacré à la précarisation généralisée du travail, on retrouvera l'éditorial d'Alain de Benoist, les rubriques «Cartouches», «Le combat des idées» et «Panorama» , un choix d'articles variés, dont un dézingage en règle de l'Histoire mondiale de la France de l'ineffable Patrick Boucheron par François Bousquet,  et des chroniques sous les plumes talentueuses d'Hervé Juvin, d'Olivier François, de Ludovic Maubreuil, de Laurent Schang ou de Christophe A. Maxime...

    Bonne lecture !

    Vous pouvez commander ce numéro ou vous abonner sur le site de la revue : http://www.revue-elements.com.

     

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    Au sommaire :

    Éditorial           

    Déconstruction

    Forum-agenda

    L’entretien

    Lucien Jerphagnon, mon maître, par Jean-François Gautier           

    Cartouches

    Le regard d’Olivier François : Jean-Jacques Langendorf

    Une fin du monde sans importance, par Xavier Eman

    Le carnet géopolitique d’Hervé Juvin

    Cinéma : Le mystère Clouzot

    Champs de bataille : Vous avez dit Sadowa ?

    Musique : La musique de Franco Battiato

    Sciences

    Le combat des idées

    Histoire mondiale de la France

    Le fléau de la solitude

    Washington contre de Gaulle

    La France sous la coupe des « ultratlantistes »

    Faut-il jeter l’Union européenne à la poubelle ?

    Sur terre ou sur mer avec Carl Schmitt

    Nos cinq coups de cœur de la rentrée littéraire

    La musique sur grand écran de Bertrand Burgalat

    Bertrand Burgalat, dandy électrochic

    Chevaucher le tigre avec Fritz Lang

    Le monde magique de Ladislas Starewitch

    Voyage dans le Grand Londres avec Iain Sinclair

    Jack London, écrivain populiste

    Dossier

    En marche vers l’ubérisation : l’autre Grand Remplacement

    Merci patron ! Tous précaires

    Produire ou consommer, par Pierre-Yves Gomez

    Le travail à l’heure des « hommes en trop »

    Les jobs à la con

    Robots, les travailleurs du futur ?

    La révolution managériale

     

    Panorama

    L’œil de Slobodan Despot

    Série télé : The 100, dernier arrêt avant l’Apocalypse

    Philosophie : Peut-on vouloir être immortel ?

    L’esprit des lieux : Trieste avec Paul Morand

    C’était dans Éléments : Vers un revenu de citoyenneté

    Éphémérides

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  • La revue de presse d'un esprit libre... (33)

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    La revue de presse de Pierre Bérard

    Au sommaire :

    L’Ukraine est à l’épicentre du nouveau conflit Est-Ouest. Ce conflit est global ou « hybride » ce qui signifie qu’il ne mobilise pas principalement des armées ou des milices, mais qu’il implique outre la diplomatie, l'économie, le juridique et le médiatique, dans l’espoir d’aboutir à des révolutions colorées. C’est ce qu’explique Lucien Cerise, auteur récemment d’un livre intitulé « Retour sur Maïdan » (édition Le Retour aux sources) dans le premier Libre Journal de Jean-Michel Vernochet (audio). Selon les animateurs de cette émission les docteurs Folamour du Congrès US sont capables de se lancer dans une guerre conventionnelle contre la Russie, l’Iran ou la Corée, quoiqu’en ait le président Trump en butte aux manipulations de l’État profond américain :

     
    Clin d’oeil amusé de Slobodan Despot sur l’arroseur (l’Ukraine de Poroshenko) arrosé (les États-Unis). Il serait en effet cocasse de devoir constater que les propulseurs utilisées par la Corée du Nord pour lancer ses fusées intercontinentales proviennent d’Ukraine, l'indéfectible allié du camp occidental dans sa lutte contre tous les totalitarismes : 
     

    Selon Xavier Moreau, analyste français opérant depuis la Russie, les nouvelles sanction contre la Russie prises par le Congrès américain par dessus la tête de Donald Trump visent en fait le marché énergétique européen. Il s’en explique dans la vidéo ci-contre :

    L’hallali anti-Trump qui a saisi l’ensemble des médias du monde occidental à la suite des incidents de Charlottesville est révélateur du climat d’hystérie qui s’empare de nos sociétés dès qu’il y est question de « racisme ». Les foisonnants commentaires du président des États-Unis, personnage éminemment baroque, étaient certes louvoyants et finalement contradictoires. Dans un premier temps sa condamnation des suprémacistes blancs (comme disent ceux qui prétendent ne pas croire à l’existence des races) fut réputée trop molle aux yeux du pouvoir médiatique. Dans un second temps le président qui tweet plus vite que son ombre souligna qu’après tout la « haine » était des deux cotés. C’en était visiblement trop, en tous les cas plus que ne pouvait en supporter la médiasphère qui traitait de « nazis » les manifestants venus défendre la statue du général Lee, héros des armées sudistes, dont la municipalité de cette petite ville de Virginie venait de programmer le déboulonnage. Bien entendu dés que ce qualificatif terrifiant fait son apparition, il sidère et rend impossible toute réflexion argumentée, puisqu’il submerge le lecteur d’émotion. Bref, Trump est devenu le bouc émissaire du parti du bien qui ne se lassera plus d’exiger son scalp. Revenus de cette tempête médiatique, il apparaitra que dans un camp il y avait évidemment des « nazis » de carnaval, propres au folklore américain. Ces « losers » paradaient, attirant l’objectif des photographes et des caméras (c’est à ça que servent ces narcissiques névrosés qui sont d’autant plus portés à s’exposer que les médias semblent prendre au sérieux leur manifestation tapageuse, d’où leur grande utilité pour ceux qui ont intérêt à dissimuler aux populations la nature réelle d'une situation et de ses enjeux). Bien que leur présence fut des plus visibles (et même « obscène » au sens de Baudrillard) ils étaient cependant très minoritaires dans la foule bigarrée de ceux qui étaient venus défendre à Charlottesville l’entièreté de la mémoire américaine. Qui y avait-il parmi les contre-manifestants ? De paisibles anti-racistes, mais aussi des suprémacistes noirs (Black Lives Matter) ainsi que des militants trotskistes « antifa » venus pour la castagne dont ce n’est pas faire injure à l’honnêteté que d’affirmer qu’ils ne sont pas exempts de haine. Pourquoi les médias ne parlaient-ils pas des provocateurs nazis sous le règne d’Obama ? S’agit-il de créer l’illusion qu’une guerre civile est possible, que quelques milliers de cinglés dans un pays de 320 millions d’habitants suffiraient à la déclencher ? Allons donc ! Il ne s’agit que d’associer Trump à une imagerie négative. Cette indignation des médias qui se targuent d’antiracisme mais qui pratiquent à longueur d’articles et de reportages une xénophobie anti-russe, qui n’hésitent pas à soutenir des nazis du moment qu’ils sont ukrainiens, laisse songeur. Cette course à l’échalote a même fait des émules  parmi les géants du web (dont la charte inaugurale prévoyait de laisser quiconque, quelles que soient ses idées, accéder à la toile), c’est ainsi que le mastodonte Marc Zuckerberg a décidé d’emboîter le pas aux folliculaires et d’écraser la punaise brune en supprimant de Facebook plusieurs « groupes haineux ». À n’en pas douter, son geste sera unanimement salué comme un acte philanthropique. Ci-jointe la dernière émission d'I-Média de Jean-Yves Le Gallou et d’Hervé Granchamp sur Tv-Libertés traitant en une de cette affaire : 

    https://www.youtube.com/watch?v=oB0EOTzs7P4

    Nous savons bien que la guerre de Sécession ne se résumait pas à un conflit entre les gentils « progressistes » du Nord et les « méchants » esclavagistes du Sud. Les oppositions étaient fort nombreuses entre les deux camps. Par exemple le Sud, exportateur de denrées agricoles, était favorable au libre échange, tandis que le Nord où s’affirmait une économie industrielle était favorable au protectionnisme.
    De même s’opposaient-ils sur la conception fédérale ou confédérale de l’union. C’est la décision de Lincoln d’abolir l’esclavage qui mit le feu aux poudres ce qui ne dissuada pas certains États esclavagistes de rejoindre les troupes de l’Union qui voyait plus d’avantages, selon un point de vue purement capitaliste, dans le statut prolétaire d'une classe ouvrière émancipée du fardeau de la servitude (mais nullement de son aliénation) que dans un prolétariat au statut d'esclave. Les jugement rétroactifs que beaucoup sont tentés de porter sur des périodes anciennes en leur appliquant des valeurs contemporaines sont des non-sens que réprouvent tout historien digne de ce nom. Proscrire toute trace de l’héritage confédéré comme le réclame la gauche américaine est de ce point de vue là totalement stupide et relève d’un vandalisme pur et simple, qui n’est pas sans rappeler les fureurs iconoclastes des bandes takfiristes. Pour comprendre cette époque et les véritables circonstances de la guerre de Sécession nous renvoyons au livre de Dominique Venner « Le blanc soleil des vaincus », enrichi d’une belle préface d’Alain de Benoist et réédité en 2015 chez Via Romana :
     
     
    Sur le général Lee, prétexte aux événements de Charlottesville, on se reportera à l’entretien avec Vincent Bernard réalisé pour Figaro Vox par Eugénie Bastié. Cet historien qui ne verse dans aucune  légende dorée est aussi l'auteur de la dernière biographie du héros sudiste, objet de tant d’anachronisme, de méprises et de jugements hâtifs. Ses propos, sans parti pris, sont empreints de bon sens :
     
     
    Ci-dessous un tweet d'Edouart Chanot commentant les propos d’Houria Bouteldja qui réclame l’extension du domaine de la table rase des personnalités américaines ayant soutenu l’esclavage à celles, européennes, des « racistes » des « esclavagistes » et des « coloniaux » parmi lesquelles elle range, sans trop se soucier des réalités, le général de Gaulle... qui a libéré la France du fardeau de ses colonies… Rappelons à cette pétroleuse un brin loufoque que si nous la prenions au mot en éradiquant de la mémoire universelle tous les personnages qui n’avaient que le défaut d’être de leur temps il ne resterait pas grand chose de la geste arabo-musulmane au nom de laquelle elle prétend s’exprimer. L’amnésie historique dans laquelle l’école « républicaine » entretient dorénavant la plupart de ses commensaux aboutit à ces syllogismes oublieux de la contextualisation sans laquelle l’histoire n’est qu’une discipline de diafoirus qui ne peut déboucher que sur sa réécriture permanente dans une perspective orwellienne  :
     
     
    Ci-joint le zoom d’été de Tv Libertés consacré à Jean-Yves Le Gallou et Hervé Granchamp : 
     
     
    Le zoom d’été de tv-libertés va à la rencontre de François Bousquet, écrivain, journaliste et rédacteur en chef adjoint de la revue Éléments :
     
     
    Quand un média qui ne craint pas de pratiquer la contradiction et se dit en même temps attaché à la liberté de déplacement et d’installation des hommes partout dans le monde et de ce fait milite consciemment pour l’immigration sans retenue dans nos contrées et célèbre un peuple refusant l’incursion du moindre étranger sur ces terres afin de rester maître chez lui. Nous n’osons pas aller jusqu’à penser que ces « sauvages » se trouvent absous du pêché de « racisme » tout simplement parce qu’ils sont noirs. Ce serait tellement affreux d'imaginer des choses pareilles ! l’information provient du principal quotidien français d’origine chrétienne qui, c’est la paradoxe, s’engage fortement pour l’universalisation des valeurs « républicaine ». Article de Breizh info :
     
     
    « Face au défi qu'est la présence massive de l’islam sur le sol européen et la montée en puissance mondiale de l’islam politique, la conscience de notre héritage païen est une nécessité vitale, y compris pour le christianisme ». Ainsi s’exprime Aurélien Marq dans un article tout de subtilité sur le paganisme européen, le christianisme et l’islam.
     
     
    Le vote des catholiques lors des dernières élections présidentielles françaises analysé par Jérôme Fourquet, directeur du département opinion et stratégies d’entreprise de l’ifop:
     
     
    Pour le grand linguiste Claude Hagége « imposer sa langue, c’est imposer sa pensée ». Sa crainte est soutenue par l’extension implacable de l’anglo-américain d’aéroport qui tend à devenir la langue unique et, nous dit-il, cette langue unique (et « imprécise », ce qui rend d’autant moins acceptable sa prétention à l'universalité) pourrait fort bien déboucher sur une « pensée unique » et un « formatage des esprits ». Il ajoute « seuls les gens mal informés pensent qu’une langue sert seulement à communiquer. Une langue constitue aussi une manière de penser, une façon de voir le monde, une culture ». Hagége ? Un combattant de la diversité qui mène une guerre culturelle contre le néo-libéralisme et contre nos « élites vassalisées » et américanolâtres :
     
     
    « Opération Sentinelle : Nos soldats n’en peuvent plus ». Dans cet article publié par Alexandra Laignel-Lavastine au lendemain de l’attentat perpétré à la voiture-bélier par un Algérien contre 6 militaires à Levallois-Perret, il est question du triste état de nos armées soumises à des réductions de crédit répétitives. Attaqués de face par les islamistes, nos soldats en surchauffe ont désormais le sentiment d’être poignardés dans le dos par l’État. Enchaînant les missions sans discontinuer, souvent sans but précis sur le territoire métropolitain (le plus souvent pour les besoins de la com gouvernementale), ils sont progressivement gagnés par le sentiment d’inutilité et le découragement. Leur état de démoralisation est il compatible avec la « guerre » que l’on prétend mener ? Surement pas. Ce que nos soldats attendent des politiques c’est qu’ils définissent une véritable stratégie globale antiterroriste, mais ils ne voient rien venir à par les bonnes paroles :
     
     
    Le dernier livre de Richard Labévière « Terrorisme face cachée de la mondialisation » paru aux éditions Pierre-Guillaume de Roux fait l’objet d’une excellente fiche de lecture de Michel Drac. 
    En dehors des points concernant la mouvance proprement djiadiste, il se penche avec sagacité sur le réseau néo-conservateur et atlantiste français qui opère à partir du ministère des affaires étrangères et que les diplomates appellent « la meute ». Il examine pour finir les 7 propositions que formule Labévière pour lutter efficacement contre le terrorisme  :
     
     
    Rappelons que Labévière, rédacteur en chef de la revue en ligne Proche et Moyen Orient, est un ancien de RFI, poste dont il avait été viré par Christine Ockrent, épouse du néo-conservateur à la française Bernard Kouchner, pour des analyses manquant d’empathie  vis à vis de la politique arabe de l’État israélien. Depuis il n’a plus les faveurs de la presse de grand chemin. Son livre qui a fait l’objet d’une recension dans le dernier numéro de la revue Éléments sous la plume de Christian Brosio fut également le prétexte d’un entretien particulièrement éclairant avec l’auteur sur Radio Sputnik dans une émission dirigée par Edouart Chanot :
     
     
    Le site « Les crises » publie ce document, bien entendu « orienté » (étymologiquement, tourné vers l’Orient, comme le sont la grande majorité de nos églises) puisqu’il émane de l’Association d’amitié franco-coréenne. Il permet cependant de comprendre pourquoi la Corée du Nord, et pas seulement ses dirigeants, entretient une suspicion durable, sinon une haine, à l’égard des États-Unis. Quatre millions de morts ne s’oublient pas si facilement :
     
     
    Dans une tribune du Figaro  Marin de Viry déplore que le tourisme de masse (le premier poste de dépense dans le monde), en tuant la possibilité d’un ailleurs différent, ait mis fin à toute possibilité de voyage. Avec le marketing touristique qui balise le monde entier il n’y a plus de destination ouverte à la curiosité. Citant Bernanos pour qui le monde moderne est une conspiration contre toute espèce de vie intérieure, il ajoute « je crois que le tourisme est une des modalités de destruction de la vie intérieure ». Texte initialement publié en juillet 2014 :
     
     
    Thibault Isabel, rédacteur en chef de la revue « Krisis » présente son dernier livre « Pierre-Joseph Proudhon, l’anarchie sans le désordre » sorti en juin dernier, agrémenté d’une préface de Michel Onfray  :
     
     
    Entretien avec l’écrivain Olivier Maulin paru dans la revue Limite. 
     
     
    Retour sur Karl Polanyi, auteur de « La grande transformation » qui formula dès 1944 une réponse à la mystification entretenue par Friedrich Hayek concernant sa fable du « marché autorégulé par un ordre spontané ». Depuis cet argument de faussaire est devenu central dans tous les raisonnements des néo-libéraux. Article paru sur l’excellent blog de Philitt :
     
     
    Un article sagace de Nicolas de Lamberterie sur le site de Visegrad. La Hongrie qui n’est pas réputée pour accueillir chez elle tout ce que les industries de Soros et de tant d’autres nous présentent comme d’authentiques « réfugiés », fait une exception en se proposant d’intégrer à sa société une actrices iranienne convertie au christianisme. Mais le plus extraordinaire n'est pas là. Ayant fait des démarches auprès de la Suède l’actrice s’est vu refuser le statut auquel elle pensait avoir droit mais qui lui a été refusé sous prétexte de sa conversion. Ceci au moment où la Suède renonce à priver de leur citoyenneté les combattants islamiques de retour dans « leur pays ». Si les Hongrois prouvent ici un sens très affuté de l’humour, que dire des Suédois sinon qu’ils démontrent une fois de plus leur insondable bêtise :
     
     
    Sur son site l’écrivain Christopher Gérard rend compte de la mort de David Mata, gentilhomme des lettres et guerrier de l’Europe secrète :
     
     
    « La meilleure et la plus belle structure familiale est celle dans laquelle les enfants grandissent avec un père et une mère ». Propos et témoignages d’enfants élevés au sein de familles homosexuelles recueillis par Charlotte d’Ornellas :
     
     
    « La patrie est une réalité sociale concrète », un court texte de Julien Freund :
     
     

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  • La revue de presse d'un esprit libre... (32)

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    La revue de presse de Pierre Bérard

    Au sommaire :

    Dans le cadre de la Fondation Res Publica Jean-pierre Chevènement interroge Régis Debray (dubitatif) et Michel Onfray (affirmatif) sur l’idée de civilisation. Débat de haut niveau de par l’étincelant brio de ses protagonistes (vidéo) :

     
    André Perrin est l'auteur de « Scènes de la vie intellectuelle en France, l’intimidation contre le débat », livre d’un ancien inspecteur d'Académie très à cheval sur les règles de la bonne argumentation philosophique. Dans ce livre, il montre par quelles techniques la culture du débat s’est progressivement asséchée  en France laissant à la « pensée unique » tout l’espace de la libre controverse et muselant toute pensée alternative. Ainsi notre pays qui était autrefois le centre vivant de la culture de la « conversation » comme le dit Finkielkraut, est-il devenu une « école du lynchage médiatique » (titre de l’entretien que l’écrivain a accordé à David L’Épée dans le dernier numéro d’Éléments) où l’on pétitionne, non pour défendre la liberté d’expression, mais pour en prohiber l'exercice. Dans cette tribune du Figaro vox André Perrin prend la défense d’Éric Zemmour, tête de Turc des médias de propagande, qui vient d’être rappelé à l’ordre par le CSA pour « éloge de la discrimination », notion éminemment plastique qui se prête à toutes les manipulations. Il fait remarquer que les procureurs quand ils dénoncent ne cherchent pas à savoir si l’assertion des suspectés est vraie ou fausse mais à les rapporter aux conséquences néfastes qu’elle est susceptible d’engendrer. Il compare ensuite les tweets de Mehdi Meklat, laissés dans l’ombre par les médias aux condamnations effectives, par la rumeurs médiatique ou par la justice, de Renaud Camus, Olivier Pétré-grenouilleau, Alain Finkielkraut, ou de Richard Millet. L’exercice est probant… :

    http://www.lefigaro.fr/vox/societe/2017/07/21/31003-20170721ARTFIG00227-zemmour-hanouna-angot-meklat-l-indignation-selective-des-vigies-de-l-audiovisuel.php

    Article d’André Perrin paru en mai  dans lequel il fait une longue et rigoureuse mise au point sur « Démocratie, tyrannie des minorités, paradoxes de la majorité ». Que veut-on dire quand on invite à respecter les minorités ? S’agit-il de respecter leurs intérêts particuliers, ou bien de respecter les droits inaliénables de tout être humain ? Et pour protéger les minorités, faut-il aller jusqu’à la promotion des privilèges ?   :
     
     
    Extension législative du domaine des « crimes pensée » au nom de la lutte contre toutes les formes de « racisme ». Un racisme qui « a aujourd’hui le dos si large qu’il permet de confondre toute personne qui aurait le culot de voir les différences culturelles autrement que pour les célébrer… ». Ainsi s’exprime Elisabeth Lévy à propos de la stupide loi « confiance ». Elle fustige « un consternant asservissement à l’air du temps et aux vaches sacrées d’une époque qui ne tolère plus que l’on ait quelque chose à cacher ». Elle s’en prend surtout, au delà de la grotesque transparence que la dite loi prétend promouvoir, au « forfait contre la liberté d’expression, donc, contre la démocratie, contenu dans l’article 1 de la loi, modifié au cours des débats par les amendements 572 et 621, dont Alain Jacubowics, le patron de la Licra, tient absolument à faire savoir urbi et orbi qu’ils ont été inspirés par son association ». Forfait supplémentaire à ajouter à tous ceux que les ligues de vertu, bras armés de la police de la pensée, et même des arrière-pensées, peuvent adjoindre à un palmarès conséquent. Plutôt que d’argumenter contre les idées qui leur déplaisent, nos pudibonds représentants, essentiellement les blaireaux d’En Marche, choisissent de les criminaliser. C’est assurément plus reposant pour leurs leucémiques méninges :
     
     
    Salutaire coup de gueule d’Anne-Marie Le Pourhiet, professeur de droit constitutionnel à l’université de Rennes I, contre l’une des mesures adoptées par les députés prévoyant d’étendre le principe de l’inéligibilité aux personnes condamnés pour racisme, antisémitisme ou homophobie. « L’envie du pénal » qui se manifeste ici semble irrépressible et restreint le débat à la portion congrue des poncifs en cours. Comme le dit Elisabeth Lévy c’est le triomphe de « la République des chochottes », loin, très loin de l’impératif dialogique dont se targue pourtant la « société ouverte ». 
    Mais le plus accablant n’est il pas que tout cela passe comme une lettre à la poste, dans l'apathie d’une opinion amorphe tandis que les pseudo « insoumis » ne mouftent pas ? Le Front national, lui, est carrément aux abonnés absents. Ses électeurs apprécieront :
     
    Loin des incantations bien pensantes, le sociologue québécois Mathieu Bock-Côté met en garde contre ceux qui entendent mettre en place des dispositifs inhibiteurs imposés comme un nouvel ordre moral et destinés à proscrire la critique de l’idéologie diversitaire. Tribune libre du Figaro vox du 31 juillet 2017 dans laquelle il associe son esprit critique à ceux d’Anne-Marie Le Pourhiet et d’Elisabeth Lévy afin de combattre la tyrannie qui s'annonce. Si le politiquement correct peut intimider les velléitaires, séduire les jobards et enthousiasmer les fanatiques, aucun risque qu’il ne passe par lui.
     
    Toujours dans la même veine Marc Nacht s’en prend à « la police du langage » telle qu’elle apparaît dans la volonté du législateur. Le mot nous dit-il devient le premier coupable. « Sous son air bien-pensant, trop bien pensant, poursuit-il, cet amendement inaugure officiellement un processus d’exclusion des termes ne correspondant pas à la pensée correcte du moment. Un précédent tragique devrait nous mettre en garde contre ce genre de dérive, même en démocratie. C’est celui décrit par Victor Klemperer dans « LTI, la langue du III Reich » où l’officialisation autoritaire du déni de réalité vise à remplacer les mots de la pensée qui désignent l’évidence des faits par des périphrases ou d’autres mots qui masquent la véritable nature de ces faits… Ne pas pouvoir nommer autrement que par ce qui est convenu est l’ABC du totalitarisme… ». On pourrait en dire autant de la fameuse « langue de bois » qui avait cours dans les démocraties populaires :
     
     
    Jure Geoges Vujic publie dans Polémia une tribune intitulée « Une praxis révolutionnaire et conservatrice est-elle encore possible ? ». Prenant acte de l’inexistence d’une telle praxis, susceptible de transformer les rapports sociaux, les façons de sentir et de penser, face à celle bien réelle et fort agissante du capitalisme libéral associé au discours libertaro-sociétal, il propose de penser une nouvelle praxis « révolutionnaire » remettant en cause celle hégémonique de la « valeur marché ». Ce qu’aucune force réputée « populiste » n’est en mesure de faire. Réflexion capitale sur la nécessaire repolitisation du « système des objets » :
     
     
    Le site « Les Crises » souvent bien inspiré, est animé par Olivier Berruyer. Il reprend un entretien de Coralie Delaume avec Hadrien Desuin qui vient de publier « La France atlantiste » aux éditions du Cerf. Le géopoliticien y reprend les arguments avancés dans son livre pour montrer une diplomatie nationale complètement phagocytée par les néo-conservateurs français, oeuvrant pour liquider l’héritage « gaullo-mittérrandien ». Au cours de sa démonstration il revient sur l’origine de ses néo-conservateurs, presque tous issus des ONG humanitaires des années 70 et 80, qui soldaient dans le « droit d’ingérence » leur passé communiste ou trotskiste. Référence aux travaux de Jean-Robert Raviot  :
     
     
    Les 26 et 27 mai, premier colloque eurasiatique à Chisinau en république de Moldavie. Il était organisé par le mouvement eurasiste, l’Université Populaire de Moldavie et le comité Jean Parvulesco. Étaient présents l’ancien vice-premier ministre de Moldavie Iurie Rosca, l’essayiste français Hervé Juvin, le philosophe russe Alexandre Douguine et Emmanuel Leroy dirigeant d’une association humanitaire française d’aide aux enfants du Donbass. La tonalité générale du colloque était centrée sur la lutte contre la globalisation et l’hostilité à l’impérialisme des thalassocraties anglo-saxonnes qui signifie uniformisation marchande de la planète, individualisme et cosmopolitisme. Elle était orientée, dans une perspective de paix, sur une réalité d’ores et déjà en train de s’esquisser, celle d’un nomos de la terre ordonné à la constitution de grands espaces, à la multi-polarité et à la souveraineté des peuples. Compte-rendu par une équipe de TV Libertés :
     
     
    Une intéressante contribution de Pierre-Henri Picard au débat sur la reconstruction d’une droite assumée :
     
     
    Dominique Baettig, ancien conseiller national suisse, tire les leçons du désenchantement des milieux nationaux et identitaires européens après les défaites électorales qu’ils viennent de subir. Ne pas s’en remettre à des partis politiques qui, par la force des choses, entrent plus ou moins dans le moule et s’organiser de façon autonome sur le plan local en y multipliant les liens de solidarité concrète, soutenir les sites de réinformation, « promouvoir les valeurs d’enracinement, de démocratie de proximité, du localisme » et favoriser les entreprises qui tendent vers la décroissance :
     
     
    Michel Drac chronique lumineusement un livre de Jean-Michel Vernochet intitulé « Les égarés » (éditions Sigest). Celui-ci est centré sur la question du wahhabisme dans lequel il voit non seulement une hérésie intransigeante mais une idéologie de combat rivale de l’islam traditionnel. En somme un contre-islam pratiquant « un rigorisme au delà de toute raison » adossé paradoxalement à l’idéologie anarcho-libérale du capitalisme contemporain. Ce wahhabisme régressif (du point de vue progressiste occidental), encore appelé « takfirisme » est l’objet de toutes les manipulations, notamment de la part des anglo-saxons, anglais d’abord puis américains. Intéressante réflexion, par ailleurs, sur le protestantisme européen comparé au protestantisme américain, et sur les points communs de représentation du monde entre le calvinisme puritain et le wahhabisme, même si ils s’insèrent, bien entendu, dans des catégories très différentes de la foi  :
     
     
    Toujours aussi impertinente avec les puissants, tant qu’ils ne sont pas alignés sur la moraline occidentale spécialisé dans la production industrielle du Bien, la presse française s’est trouvée, depuis quelques années, une nouvelle cible. C’est ainsi que l'exercice russophobe est devenue une activité banale pour les médias français. L’invitation à Paris de Valery Gergiev, l’un des meilleurs chefs d’orchestre du moment, à l’occasion de la célébration du 14 juillet a ainsi permis à la presse de propagande de donner toute sa mesure. Choix « polémique » d’après France musique, « l’intriguant maestro de Poutine » d’après Les échos, « sulfureux » selon L’Obs, qui va jusqu’à reprocher à Gergiev d’avoir dirigé à Palmyre après sa première libération des fanatiques de l’organisation de l’État islamique. Il est vrai que Valery Gergiev n’était en France que pour célébrer le centenaire de la présence des 40 000 hommes du corps expéditionnaire russe qui ont combattu aux cotés des poilus dans la grande boucherie de 14-18. Mais voilà, ce chef exigeant est aussi un ami du président Poutine. Scandale ! Tandis que le président Macron reçoit en grande pompe les chanteurs Bono et Rihanna sous les commentaires dithyrambiques de nos médias… : 
     
    première référence issue de la lettre hebdomadaire de Slobodan Despot :
     
    deuxième référence issue du site « Stoprussophobie » :
     
     
    Slobodan Despot donne quelques nouvelles du Decodex du Monde crée avec l’argent de Google (et du contribuable) et présenté, sans rire, par ses concepteurs, comme un « outil de vérification de l’information ». On pensait que cette remarquable innovation avait rejoint les poubelles de l’histoire tant elle avait disparu des écrans radar. Il n’en est rien (première référence). L’ Observatoire des Journalistes et de l’ Information Médiatique (OJIM) a consacré en mai dernier une excellente vidéo à cette nouvelle Pravda (ou du ministère de la vérité d’Orwell) relevant ses parti-pris, ses erreurs et 
    ses fréquentes manipulations (deuxième référence) :
     
     
     
     
    Deux réponses fort bien tournées et à vrai dire plutôt subversive à son excellence Bernard-Henri Lévy après sa philippique du Point (le 20 juillet) où il accusait sans raison Le Monde Diplomatique de nauséabondes complicité avec les heures les plus sombres de notre malheureuse histoire. Celle pleine d’humour (noir) de Paul-Éric Blanrue tout d’abord (première référence), puis celle plus compassée du physicien Jean Bricmont. Celui-ci proche de Noam Chomsky, traite dans ses ouvrages de la censure et de la propagande dans les régimes démocratiques. Il est l’un des champions d’une liberté intégrale de l'expression publique (seconde référence) : 
     
     
     
    « Terre et mer », l’ouvrage de Carl Schmitt paru originellement en 1942 et préfigurant « Der nomos der Erde » (1950) vient d’être réédité par les éditions Pierre-Guillaume de Roux. Doté d’une substantielle et érudite introduction (93 pages) signée d’Alain de Benoist, il est post-facé par Julien Freund (texte de 1985, pour la première édition en français de Terre et mer, parue aux éditions du 
    Labyrinthe) : 
     
     
    Courte notice d’Aristide Leucate sur cette réédition :
     
     
    Le numéro 80 de « Rébellion » vient de sortir. Au sommaire des entretiens avec Thibault Isabel (comme toute plante qu’on arrache à la terre, notre civilisation est en train de faner), Alain de Benoist (Deux France qui n’ont plus rien en commun), un article sur cinéma et politique (Pasolini, le corsaire solitaire) etc :
     
     
     
    Secrétaire général de la Fédération national de l’agriculture biologique, Guillaume Riou répond aux questions de Libération à propos du gouvernement Macron qui à décidé de geler les aides aux productions de l’agriculture biologique, ce qui va à l’encontre de la forte demande des agriculteurs conventionnels pour passer au bio. Selon Riou le gouvernement, obéissant à des groupes de pression multiples, favorise ainsi les grandes exploitations industrialisées de forme céréalières, si possible exportatrices et fait le choix de l’agro-business :
     
     
     
    Dans une tribune du Figaro Natacha Polony que l’on sait partisane de la décroissance revient sur les problèmes évoqués ci-dessus et sur « le jour de dépassement » fixé cette année au 2 août. Ce jour de dépassement signifie qu’au delà de cette date l’humanité aura cessé de consommer l’ensemble des ressources que la nature peut renouveler en une année. Le jour du dépassement était en 1985 fixé au 5 novembre; en 1997, fin septembre. Il avance inexorablement sans que les hommes ne prennent les mesures qui s’imposeraient pour en reculer l’échéance. Croissance du PIB et croissance de la population mondiale jusqu’à la catastrophe finale ?
     
    Le mensuel La Décroissance, sous-titré « Le journal de la joie de vivre » publie dans son numéro de juillet-août un succulent dossier sur le thème « Déradicalisons les progressistes ». Ce voyage critique dans l’immense galaxie des croisés du progrès s’attaque aussi bien aux politiques, de Jean-Luc Mélenchon à Marine Le Pen, qu’aux intellectuels, de Bernard Stiegler à Michel Serres et Luc Ferry. La cible privilégiée de ce mensuel demeure néanmoins les « écotartufes », ces « Verts » qui militent pour une « croissance écologique » ou un « capitalisme vert »; illustration de la politique de l'oxymore: 
     
     
    La France toujours plus moche. C’est Slate qui le dit, à juste titre. Mais pourquoi un tel saccage ? L’enquête ne répond nullement à cette question pourtant essentielle. Comme disait Jacques Bénigne Bossuet dans un célèbre sermon : « Dieu se rit des hommes qui se plaignent des conséquences alors qu’ils en chérissent les causes »  :
     
     

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  • Révolte ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un billet d'Eric Werner, cueilli dans le n°84 d'Antipresse, lettre d'information gratuite de Slobodan Despot, disponible par abonnement et financée par les dons de ses lecteurs.

    Penseur subtil et profond, Eric Werner est l'auteur de plusieurs essais marquants comme L'avant-guerre civile (L'Age d'Homme, 1998 puis Xénia, 2015) L'après-démocratie (L'Age d'Homme, 2001), Douze voyants (Xénia, 2010), De l'extermination (Xénia, 2013) ou Le temps d'Antigone (Xénia, 2015) et de recueils de courtes chroniques comme Ne vous approchez pas des fenêtres (Xénia, 2008) et Le début de la fin et autres causeries crépusculaires (Xénia, 2012). Il vient de publier dernièrement Un air de guerre (Xénia, 2017).

    On peut également suivre les chroniques de l'auteur sur L'avant-blog - Chronique de la modernité tardive.

     

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    Révolte ?

    C’est une question, parfois, qu’on se pose (et aussi que d’autres nous posent: Indiens et Chinois en particulier): pourquoi les Européens ne se révoltent-ils pas? Qu’attendent-ils pour le faire?

    Il y a plusieurs réponses possibles. La première est la réponse officielle. Les gens, voyez-vous, n’ont plus besoin aujourd’hui de se révolter, puisque, comme tout le monde le sait, il existe une alternative à la révolte: la participation aux élections. J’ignore, à vrai dire, si beaucoup de gens se satisferaient de cette réponse. En tout cas pas les quelque 50 % d’électeurs qui se sont abstenus lors des dernières législatives en France: élections qui ont fait qu’un parti ayant recueilli 28 % des voix au premier tour (15 % des inscrits) s’est assuré à lui seul la majorité des trois quarts des sièges à l’Assemblée nationale. En théorie, le débat public est ouvert, n’importe qui, quelles que soient ses opinions, même les plus dérangeantes, peut y participer. Mais il y a loin de la théorie à la réalité. Qui ne voit, justement, que le débat public est très largement aujourd’hui verrouillé, en sorte que beaucoup, non sans raison, en sont venus à considérer toute espèce, quelle qu’elle soit, de participation à la vie politique, comme une perte de temps.

    Une autre réponse serait de dire qu’il est devenu aujourd’hui très difficile, pour ne pas dire impossible, de se révolter. À la limite, même, ce n’est même plus pensable. Le mot lui-même a un petit air ringard. Camus a écrit autrefois un ouvrage intitulé: L’Homme révolté. Mais c’était en 1951. Il en va de même du mot révolution. Qui parle aujourd’hui encore de faire la révolution? Certains en inféreront que les gens sont au fond satisfaits de leur sort, partant n’ont aucune raison de se révolter, moins encore de faire la révolution. On peut le penser, mais on pourrait aussi penser que la peur joue ici un rôle. Face à l’État total et aux formes, également totales, que revêt aujourd’hui la répression (état d’urgence, lois antiterroristes, etc.), autant se tenir tranquille, n’est-ce pas? Et c’est ce que font les gens. Ils adoptent un profil bas. Cela ne signifie pas qu’ils soient contents de leur sort: en aucune manière. Mais ils sont prudents.

    Troisième réponse possible. Adopter un profil bas, ce n’est pas nécessairement ne rien faire, rester passif. À y regarder de près, les gens font en réalité beaucoup de choses: beaucoup plus, en tout cas, qu’on ne le croirait de prime abord. Mais de petites choses. Par révolte on entend, d’ordinaire, une confrontation directe et ouverte à l’État, avec des leaders et une organisation bien huilée. Si l’on s’en tient à cette conception-là de la révolte, on en conclura évidemment que les gens ignorent ce que se révolter veut dire.

    Mais la révolte peut s’entendre aussi autrement. Évoquant tous ces phénomènes et d’autres encore, un anthropologue a parlé de résistance «au quotidien» [1]. Cela passe par de petits actes d’insubordination, parfois aussi, il est vrai, de délinquance. En règle générale, ils passent inaperçus, donc restent non documentés. La trace, si trace il y a, s’en efface très vite.

    Ce sont les individus qui agissent ainsi, et en règle générale ils agissent seuls. Leurs actions sont informelles, non coordonnées. L’évasion fiscale elle-même, précise notre auteur, est à considérer sous cet angle [2]. Et le travail au noir. On pourrait élargir son propos à ce qu’on appelle aujourd’hui l’économie alternative (troc, systèmes d’échanges locaux, AMAP, etc.) [3]. C’est sous cette forme aussi que se décline, à notre époque, l’esprit de résistance. Mais c’est une résistance au quotidien. Donc non spectaculaire.

    Les sociétés ouest-européennes sont aujourd’hui engagées dans une histoire qui va toujours plus vite, histoire, en sens inverse, sur laquelle les individus eux-mêmes ont le sentiment d’avoir de moins en moins prise. Quand on nous annonce que pas moins de 12'000 personnes ont débarqué ces jours derniers en moins de 48 heures sur les côtes italiennes et que ce chiffre n’est rien encore par rapport à ce qui nous attend demain (on parle de millions, quand ce n’est pas de dizaines de millions de personnes), les gens se sentent dépassés.

    Ce sentiment est évidemment trompeur. Il est faux de prétendre que les gouvernants n’ont d’autre choix possible que de pactiser avec les extrémistes pro-immigrés, qui poussent à la roue dans ce domaine, ou encore d’envoyer des bateaux de sauvetage en Méditerranée. Ils pourraient très bien faire autre chose. Mais ils ne le veulent pas.

    Lors de sa récente intervention au congrès de Versailles, le nouveau président Macron a dit que des «décisions difficiles» allaient devoir être prises dans ce domaine. On voit bien plus ou moins lesquelles. Il pourrait très bien ne pas les prendre. Rien, ni intellectuellement, ni moralement, ne l’y oblige. Mais il les prendra. C’est dramatique à dire, mais on sent qu’il voudrait faire comme Mme Merkel en 2015: répéter en France l’opération allemande de 2015.

    C’est dans ce contexte que se posent les questions ici évoquées (et d’autres connexes: mais les évoquer excéderait le cadre de cet article). Elles ne prennent sens que si l’on admet que l’histoire n’est pas déterminée d’avance et que, comme le pensait Bergson, le devenir est changement, donc aussi enrichissement, permanent. Il est vital de le croire, sans quoi rien ne sert à rien, ni rien non plus ne se fera. Ce sur quoi, hélas, parient les Merkel et autres Macron. Eux croient et surtout veulent nous faire croire que l’histoire est écrite d’avance, qu’il n’y a rien d’autre à faire qu’à s’y adapter. Si nous les écoutons, nous sommes évidemment perdus. On pourra tirer un trait. Mais on peut très bien aussi ne pas les écouter: cause toujours. Et tout bonnement, faire ce que nous avons à faire.

    Eric Werner (Antipresse n°84, 9 juillet 2017)

     

    Notes :

    1. James C. Scott, Weapons of the Weak: the Everyday Forms of Peasant Resistance, Yale Universitiy Press, 1985.

    2. Ibid., p. 295, note 101.

    3. Cf. Eric Dupin, Les Défricheurs, La Découverte, 2014.

     

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